Du 26 mars au 23 avril, l’ASBL CLAIR a proposé à ses membres de participer à une enquête on-line sur « l’éducation thérapeutique ».
Les résultats montrent bien combien l’Association a eu raison de soutenir le projet d’éducation thérapeutique organisé par les Cliniques St Luc.
Réponses reçues et données démographiques :
Nous avons reçu 190 réponses, 153 femmes (80%), 19 hommes (10%) et 10% qui ont préféré ne pas répondre à cette question. 76,3% des réponses viennent de Belgique, mais nous sommes aussi très suivis en France (22,4%), et dans une moindre mesure au Luxembourg et en Afrique francophone.
Notre groupe couvre vraiment tous les âges :
- 8 participants ont mois de 25 ans,
- 18 entre 25 et 35,
- 35 entre 35 et 45 ans,
- 43 entre 45 et 55 ans,
- 42 entre 55 et 65 ans,
- 35 entre 65 et 75 ans,
- 6 au-delà de 75 ans.
- 3 ont préféré ne pas répondre.
La plus grande part des participants ont un lupus (91) ou une des formes d’arthrites (62), les autres pathologies représentant 37 personnes au total.
- 56 participants (29%) travaillent à temps plein,
- 27 (14%) à temps partiel,
- 12 sont sans emploi,
- 7 sont étudiants,
- 53 (28%) sont retraités,
- 35 (18%) n’ont pas répondu à cette question.
Parcours avec la pathologie :
Il n’est pas facile d’être confronté à un diagnostic de maladie chronique et de vivre avec elle sur une route souvent semée d’embûches. Notre première question tentait de comprendre où les patients se situaient sur le parcours avec leur pathologie. En effet, selon un modèle communément admis, chaque personne confrontée à une maladie chronique, traverse différentes étapes.
En général, le parcours commence par une phase de déni, où le patient est sous le choc, sidéré, avec l’impression « d’être en train de faire un mauvais rêve, qu’il va se réveiller et que tout rentrera dans l’ordre ». La maladie et ses conséquences envahissent les pensées. C’est le cas de 14 (8%) des participants.
Souvent, l’étape suivante est de recueillir des informations pour apprendre à affronter la maladie, sans vraiment savoir comment l’aborder. La personne peut se sentir un peu déroutée, mais elle commence à vivre vraiment avec la maladie. C’est le cas de 32 (18%) des participants.
A l’étape suivante, où se retrouve la majorité des participants (57% – 101 personnes), le patient trouve « sa » façon de gérer la maladie et ses répercussions sur le quotidien. Sans doute, tout n’est pas encore au point, en raison des bons et des mauvais jours, mais il a identifié sa manière propre de les vivre et d’y faire face. Il prend ses médicaments « machinalement », puis il ne pense (presque) plus à la maladie.
Pour certains (21 personnes dans cette enquête soit 12% des participants), une étape suivante est d’intégrer la pathologie dans des objectifs constructifs. Puisque je dois vivre avec cette pathologie, autant l’intégrer positivement dans ma vie : ils s’engagent dans un groupe de patients dont ils deviennent bénévoles, porte-parole, patients-experts ; ils aident les autres à surmonter les difficultés auxquelles ils ont été confrontés, …
Compétences actuelles et désirées
L’éducation thérapeutique est « le processus par lequel les patients acquièrent des compétences leur permettant de gérer leur maladie, d’améliorer leur état de santé et leur qualité de vie ». Il ne s’agit donc pas d’accumuler les informations, les statistiques ou les noms savants, mais bien de construire des compétences qui permettent de vivre mieux, au jour le jour, avec sa pathologie.
- 42 participants (22%) considèrent leurs compétences actuelles comme inexistantes, très insuffisantes ou insuffisantes.
- 85 (45%) comme suffisantes ou bonnes,
- 49 (26%) comme très bonnes ou excellentes,
- 14 (7%) n’ont pas répondu à cette question.
Plus d’un tiers des participants (58 personnes – 35%) n’ayant pas encore atteint le niveau « excellent » souhaite améliorer ses compétences dans ce domaine.
Sources et outils :
Les compétences acquises l’ont été grâce à différentes sources. Les participants ont attribué aux médecins et à leurs équipes 32% de l’apprentissage total, suivi par internet (27%), les associations de patients (23%) et des personnes à titre individuel (18%).
Les outils utilisés sont aussi variés. Les compétences transmises par les médecins l’ont été grâce aux informations données par le médecin lors des consultations (145 personnes), mais aussi les conférences données souvent au sein des groupes de patients (85). Les organisations de patients transmettent ces compétences via leurs bulletins d’information et publications régulières (60), leurs groupes Facebook (55) et leurs sites Internet (39). Les compétences acquises grâce à Internet le sont sur base de la consultation de sites Web d’informations médicales (90) et de recherches via Google ou Wikipédia sur le web (88)
Par contre, très peu de patients (24 personnes – 13%, parmi lesquels 6 personnes habitant en France) ont participé à un programme spécifique d’éducation thérapeutique, qu’il soit donné au sein d’un hôpital (12), d’une organisation de patients (5) ou via Internet (10).
Seuls 14 personnes mentionnent les infirmières ou conseillers paramédical en clinique comme un des moyens d’éducation thérapeutique dont ils ont bénéficié. Ceci n’est malheureusement pas étonnant, dans la mesure où en Belgique francophone, les infirmières spécialisées en rhumatologie sont particulièrement peu nombreuses.
La consultation d’Internet apparait comme une source importante de développement des compétences pour gérer sa pathologie.
- 13 participants utilisent quotidiennement Internet pour se procurer des renseignements sur leur pathologie,
- 18 l’utilisent plusieurs fois par semaine,
- 13, une fois par semaine,
- 18, 2 fois par mois,
- 15, une fois par mois,
- 58, moins d’une fois par mois,
- 18, « jamais ».
La fréquence d’utilisation moyenne d’Internet est entre 6 et 7 fois par mois dans les premiers stades de la pathologie, puis diminue de moitié une fois qu’on a trouvé « sa façon » de gérer la pathologie, et remonte lorsqu’on s’engage au sein d’association, comme patient expert, …
Qualité de l’information et souhait pour la suite :
En ce qui concerne la qualité, la fiabilité et l’utilité de l’information donnée, les résultats sont à la fois rassurants et interpellant :
- Les médecins arrivent en tête avec un score de 3.8/5 pour 145 patients ayant émis une opinion.
- Les organisations de patients arrivent ensuite avec 3.2/5 pour 109 opinions émises
- Suivent les cliniques et hôpitaux (3.2/5, 107 opinions),
- Internet obtient un score plus bas (3.0/5, 129 opinions), à égalité avec les infirmières (3.0/5, 91 opinions).
- Les patients individuels et les réseaux sociaux arrivent en dernières positions avec 2.8 et 2.7/5 (92 et 96 opinions émises).
Quant à savoir quelle est la source privilégiée pour obtenir des informations supplémentaires pour mieux gérer sa pathologie et ainsi parvenir à une meilleure qualité de vie, les médecins restent la source préférée avec 3.8/5, suivis par les organisations de patients 3.0/5, devançant significativement internet (2.2/5), les hôpitaux et cliniques (2.0/5). Les infirmières (1.8/5), patients individuels (1.7/5) et réseaux sociaux (1.4/5) conservent leurs positions.
Conclusions :
35% des patients sont en demande de plus d’éducation thérapeutique, pour mieux gérer leur pathologie et améliorer leur qualité de vie. Les médecins sont la source (tant actuelle que future) préférée d’information, suivis par les associations de patients.
L’éducation thérapeutique reste très informelle parmi nos membres et il existe une réelle opportunité pour la développer de manière formelle, car seuls 12% ont eu l’occasion de la pratiquer. Le rôle des infirmières dans l’éducation thérapeutique reste lui aussi à développer car elles sont actuellement sous équipées pour jouer un rôle de premier plan. Internet est largement utilisé comme source d’information, en particulier aux premiers stades de la pathologie, et il convient donc de renseigner aux nouveaux patients les sources les plus fiables où on peut trouver une information de qualité.
Article rédigé par Alain Cornet, administrateur de l’ASBL CLAIR